قضايا و حوادث La pédopsychiatre Ahlem Belhaj lève le voile sur 4 cas d’enfants ayant subis des violences sexuelles, de l’harcèlement et du racket
Dans le cadre d’une rencontre organisée par l’association Zennobya en faveur de l’enfance en détresse, la pédopsychiatre Ahlem Belhaj a donné une conférence portant sur les violences subies par les enfants sur le chemin de l’école. Elle a notamment parlé de 4 cas d’enfants qui ont été victimes de viols, d’attouchements sexuels, d’harcèlements et de rackets.
Docteur Ahlem Belhadj a commencé par une présentation générale dans laquelle elle a dit que "lorsqu’on parle de l’école, on parle également de son environnement. L’école est un lieu d’apprentissage, de socialisation, d’épanouissement, c’est l’objectif mais concrètement on est très loin de ça. On sait très bien que l’école vit des difficultés, vit une crise et on parle de plan pour renouveler cette école. L’environnement de l’école est aussi en difficulté".
Docteur Belhaj relève notamment deux types de problèmes que peut rencontrer un enfant ou un adolescent sur le chemin de l’école à savoir l’abandon scolaire (100 mille abandons scolaires pendant l’année 2012-2013 selon l’enquête du forum tunisien des droits économiques et sociaux) qui peut être causé par l’éloignement géographique et aux problèmes de sécurité et le deuxième type de problème est relatif aux violences physiques et sexuelles subies par l'enfant sur le chemin de l’école.
Suite à cela, la pédopsychiatre s’est penchée sur 4 cas qu’elle a rencontrés dans l’exercice de son métier :
Manel (14 ans): C’est la situation d’une fille que j’ai appelée Manel et qui est âgée de 14 ans. Manel a été victime d’enlèvement, de séquestration et de viol collectif. Elle habite une zone rural. Un samedi matin, alors qu’elle rentrait de son école, éloignée de 3.5 km de sa maison, après avoir passé un examen de 8h a 10h, une voiture 404 s’est arrêtée, il y avait 4 types dedans, parmi eux un père de famille de 32 ans. Ils étaient tous drogués. Ils ont pris cette fille, ils l’ont séquestrée pendant une nuit et elle a été victime de toutes formes de violence. Les conséquences de cette agression sont de plusieurs ordres: physiques, psychologiques, sociales et continuent jusqu'à maintenant (l’agression s’est passée en 2014).
L’affaire est toujours devant le juge d’instruction qui a relâché les 4 agresseurs. Quand on est face à une pareille impunité et injustice et victime d’une pression de la part des agresseurs dans un premier temps pour marier la jeune à un de ses agresseurs comme le permet la loi tunisienne, le maintien devient difficile pour reprendre le collège.
Le délégué du patelin ou habite la fille a promis, juste après le scandale, d’arranger le route qui est en mauvais état mais rien n’a été fait.
Fin 2015, le père a dit qu’il ne laisserait plus sa fille aller au collège surtout que les agresseurs ont été relâchés. Et c’est à ce moment que je fais appel à l’association Zenoobya pour voir comment on peut aider cette fille pour qu’elle reste à l'école. Manel est par ailleurs suivie par l’association tunisienne des femmes démocrates et par une avocate pour l’affaire judiciaire et moi je la suis en tant que pédopsychiatre. Elle va mieux mais au début, c’était un état lamentable, un état mélancolique, un état de stress post-traumatique.
Aujourd’hui, Manel est encore à l’école, après que ses parents aient loué une maison à côté du collège mais des Manel, il y en a plusieurs.
Wael (9 ans): Il habite en milieu urbain à la Soukra à 700 mètres ou 800 mètres de son école mais il y a eu un chantier sur le chemin de l’école et il a été victime d’attouchements sexuels. A la dernière minute, sa sœur le sauve. La famille n’a pas suivi la plainte car c’est très dur de suivre une plainte pour abus sexuel en Tunisie vu que la procédure est pénible et loin d’être en faveur de l’enfant. La famille accompagne Wael à l’école depuis.
Et à Ahlem Belhaj de conclure ce qui suit: "On remarque que les enfants sont de moins en moins autonomes d’une manière générale et sur le chemin de l’école en particulier parce que ça devient un milieu d’insécurité".
Marwa (15 ans): Elle habite en milieu rural, a été victime de racket sur la route. Des Marwa, des Manel, des Wael, il y en a beaucoup et ça peut aller très loin.
La pédopsychiatre continue son exposé par un dernier cas, celui d’un enfant qui a été fortement harcelé dans un internat d’un milieu rural, et qu'elle voit dans le cadre d’une expertise médico-légale. Ce jeune a fait l’objet de violences physiques de la part de ses camarades, et pour se défendre il avait tout le temps un couteau sur lui. Un jour, on le harcèle et il tue. Il avait 16 ans.
Malgré le côté tragique des cas évoqués, Ahlem Belhaj termine son intervention sur une note d'espoir en disant ce qui suit: "Tout ça pour dire quoi? Est-ce que le chemin de l’école devient à ce point difficile? Dangereux? Non, il y a des situations dans lesquelles les choses se passent mal. Je pense qu’il y a beaucoup de choses à faire, notamment quand il y a des violences. Faisons en sorte que le chemin de l’école se passe dans la gaieté et la sécurité. Des actions comme celles qu’entreprend l’association Zennobya présidée par Zeyneb Farhat peuvent permettre plus de sécurité pour les enfants et plus d’épanouissement".
Chiraz Ben M’rad